Les joueurs s'entraînent en équipe en fonction de leur jeu de prédilection. 1:41
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De plus en plus professionnel, le monde des compétitions de jeux vidéo s'organise désormais autour de structures. Les joueurs y sont traités comme des sportifs, avec une préparation personnalisés aux petits oignons.
REPORTAGE

Ils sont loin les "geeks" enfermés dans leur chambre pendant des heures. Les compétitions de jeux vidéo, longtemps restées confidentielles, sont devenues en quelques années un secteur économico-culturel incontournable, au point qu'une inscription aux Jeux Olympiques est envisagée. L'image d'Épinal a laissé place à des équipes et des joueurs professionnels. Les tournois ont lieu dans des stades, devant des milliers de fans. Bref, c’est aujourd'hui plus un sport qu’un jeu. Et on ne devient pas champion de jeux vidéo par hasard. Europe 1 a pu visiter un centre d’entraînement unique en France, celui de l'équipe GamersOrigin.

Le jeu vidéo, c'est du boulot

Il ne faut pas se fier à la façade usée de cet immeuble lambda du 11ème arrondissement de Paris. Derrière la massive porte d'entrée, c'est un complexe flambant neuf qui s'étale sur 900 m2 et trois étages. Inauguré mi-septembre, le centre résonne en permanence des bruits des claviers martelés par les joueurs. Une ambiance plutôt calme ponctuée par des cris de joie - ou de rage, selon le déroulé des parties. Ici, on vient pour travailler, là où d'autres joueurs professionnels restent chez eux pour s'entraîner.

Jeux vidéo

Dans l'une des salles vitrées, Rémi Lehoult, alias Miiz quand il joue à Fortnite, se réjouit d'évoluer dans un tel environnement : "C’est ouf ! Y en a pas d’autre en France. On est très heureux d'être dans un domaine de jeu vidéo comme celui-là". Rémi fait partie des 24 joueurs professionnels de GamersOrigin. Au sein de la structure, les "gamers" sont répartis en huit équipes, une pour chaque jeu. Ils ne vivent pas dans le centre mais viennent s'y entraîner tous les jours sous la houlette d’un coach qui leur prépare des sessions de jeu et débriefe leurs performances. En résumé, c’est un peu l’équivalent du Camp des Loges pour le Paris Saint-Germain.

Une comparaison osée mais justifiée quand on voit comment les joueurs sont choyés. Équipement dernier cri, salle de sport, menus concoctés par un cuisinier… Et le soir, Jérémy, l’ostéopathe, soigne les bobos. Car le e-sport laisse aussi des traces sur le corps : mal de dos à force de rester assis à jouer, fatigue musculaire dans les bras et les mains, très sollicités, courbatures… Encore plus étonnant, le centre accueille une nutritionniste venue du monde du sport, pour conseiller des jeunes plus portés sur les boissons énergisantes et le fast-food que sur l’eau et les plats fait maison.

Renforcer la présence de la France en e-sport

Chez Gamers Origin, on parle essentiellement en anglais. Et pour cause, huit nationalités se côtoient : américain, hongrois, italien, suédois, français, belge… Comme au foot, les joueurs de l'équipe ont été recrutés lors d’un mercato. Ils signent un contrat et sont rémunérés par la structure dont ils portent le maillot. Guillaume Merlini a fondé GamersOrigin en 2011 à seulement 16 ans. Il a levé trois millions d'euros pour installer ce centre d'entraînement destiné à attirer les cadors du jeu vidéo. "Avoir un tel centre, ça permet d'abord de rassurer les parents car on recrute les joueurs parfois dès 18 ans. Ensuite, le but c'est de recruter de meilleurs joueurs et de les fidéliser car ils se sentent bien ici", souligne le jeune entrepreneur.

Salle sport

Des joueurs bien entraînés et bien nourris, ce sont des joueurs susceptibles de gagner plus de tournois. Et l'enjeu financier est énorme : certaines compétitions, comme la Coupe du Monde de Fortnite, offrent récompenses qui s’élèvent parfois à plusieurs millions d’euros. "Ici, on a un énorme staff qui nous soutient. Ça aide beaucoup mentalement et on est plus à l'aise quand on joue.", assure "Miiz", onzième mondial en duo sur Fortnite cet été. Déjà, les autres équipes françaises s'organisent pour rester dans la course : Vitality, la plus grosses structure tricolore, doit prendre cet automne ses quartiers… au Stade de France.