Onze millions de Français vivent dans des passoires énergétiques. 1:35
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Théo Maneval et Pauline Jacot, édité par Margaux Baralon , modifié à
Selon une étude du ministère de la Transition écologique, cinq millions de logements sont mal isolés. Au total, ce sont 11 millions de Français qui sont concernés par cette catastrophe environnementale et sociale. Le plan de relance présenté mercredi par le gouvernement doit s'attaquer au problème.

Alors que le plan de relance sera présenté jeudi par le Premier ministre, Jean Castex, une grande partie sera consacrée à la transition énergétique. Et notamment à ces logements qui, parce qu'ils sont très mal isolés et entraînent des déperditions d'énergie énormes, sont qualifiés de "passoires thermiques". Une nouvelle étude publiée à ce sujet par le ministère de la Transition écologique établit à 5 millions le nombre de logements qui méritent cette appellation, soit un sur cinq. Les habitants les plus touchés sont les locataires modestes du parc privé. Ils occupent 30% de ces habitats notés F ou G sur l'échelle du diagnostic de performance énergétique.

150 euros de chauffage pour un studio

Si la plupart de ces locataires vivent dans des maisons individuelles situées dans des départements ruraux - comme la Nièvre, la Creuse ou le Cantal -, d'autres sont en appartement. C'est le cas d'Alex. Les vitres de son studio n'empêchent plus l'air de passer et même les murs ne retiennent pas la chaleur bien longtemps. "Regardez, le joint qui sert à tenir le carreau part ! J'en ai pour 150 euros de chauffage par mois en hiver. Et si vous voulez prendre une douche, c'est gelé."

Le propriétaire d'Alex est son propre frère. Un homme au salaire d'intérimaire qui ne lui permet pas de lancer les travaux qu'il faudrait. "On voit la brique, l'humidité... il faut compter au moins 15.000 euros", égrène Alex. "Même avec les aides, c'est impossible."

Des aides nombreuses mais illisibles

Pourtant les aides n'ont jamais été aussi nombreuses. Le gouvernement s'est fixé l'objectif de 500.000 logements rénovés par an afin d'en faire des "bâtiments basse consommation", c'est-à-dire classés A ou B, comme le sont aujourd'hui seulement 7% des habitats français. Mais pour l'instant, seuls quelque 25.000 rénovations sont entreprises chaque année.

L'enjeu du plan de relance sera donc d'abord de rendre plus lisible le système actuel très complexe. "On a un maquis d'aides, c'est impossible de s'y retrouver si on n'est pas connaisseur", pointe Etienne Charbit, responsable des projets "Efficacité Energétique" au CLER, réseau pour la transition énergétique. "Il y a un enjeu impératif de simplification et d'accompagnement sur les ménages les plus précaires pour garantir un reste à charge qui tende vers zéro."

Vers une rénovation globale et performante

Le spécialiste estime aussi qu'il faut revoir la politique d'aides, aujourd'hui "particulièrement orientée vers une rénovation 'par geste'. On va changer une chaudière, ou les fenêtres, ou isoler les combles séparément" faute de moyens, détaille Etienne Charbit. "Or, pour respecter les objectifs gouvernementaux, il faudrait orienter toute la politique d'aides à la rénovation vers une rénovation globale et performante : au moins quatre 'gestes' de rénovation en même temps pour être plus performants que ce qui est fait actuellement."

Danyel Dubreuil, du collectif Rénovons, encourage de son côté "les personnes qui ont les plus hauts revenus, qu'elles soient propriétaires ou propriétaires-bailleuses" à "regarder attentivement" la qualification de leur logement. Selon ses calculs, ce sont au total 11 millions de Français qui vivent dans une passoire thermique. "On a vraiment un phénomène d'une ampleur très importante."